furet99
2008-10-08 11:45:10 UTC
Pour certains, évoquer le passé négrier des musulmans revient à essayer de minimiser la traite transatlantique. Pourtant, « la traite vers l'Océan Indien et la Méditerranée est bien antérieure à l'irruption des Européens sur le continent » 4. Paul Bairoch avance le chiffre de 25 millions de Noirs ayant subi la traite arabe contre 11 millions ayant subi celle des occidentaux5.
Le deuxième obstacle à l'histoire de la traite arabe est celui des sources. Des documents étrangers aux cultures africaines sont à notre disposition : ils sont écrits par des lettrés qui s'expriment en arabe et nous proposent un regard partial et souvent condescendant sur le phénomène étudié. Il est vrai que depuis quelques années, la recherche historique sur l'Afrique connaît un formidable essor, grâce à l'utilisation de nouvelles méthodes et à de nouveaux questionnements. L'historien croise les apports de l'archéologie, de la numismatique, de l'anthropologie, de la linguistique et de la démographie pour pallier les carences de la documentation écrite.
Les esclaves noirs étaient capturés, transportés et achetés par des personnages très différents. La traite passait par une série d'intermédiaires et enrichissait une certaine partie de l'aristocratie musulmane.
L'esclavage se nourrissait des guerres entre peuples et États africains, ce qui donnait lieu à une traite interne. Les vaincus devaient un tribut constitué d'hommes et de femmes réduits en captivité. Sonni Ali Ber (1464–1492), empereur du Songhaï, a mené de nombreuses guerres pour étendre son territoire. Bien qu'il fût musulman, il a réduit en esclavage d'autres musulmans vaincus12. La dynastie des Askia (Mali) a eu la même politique13.
Aux viiie et ixe siècles, les califes avaient tenté d'organiser la colonisation des rivages africains de l'océan Indien à des fins commerciales. Mais ces établissements ont été éphémères, souvent fondés par des exilés ou des aventuriers. Le sultan du Caire envoyait des trafiquants d'esclaves pour opérer des raids sur les villages du Darfour. Des bandes armées aux ordres de marchands allaient incendier les villages et rapportaient des captifs, souvent des femmes et des enfants. Face à ses attaques, les populations formaient des milices, érigeaient des tours et des enceintes afin de protéger leurs villages.
motifs économiques étaient les plus évidents. Dès les débuts de la conquête arabo-musulmane, le manque de main d'œuvre entraîna le besoin d'utiliser des esclaves sur les chantiers ou dans les mines de sel. La traite occasionnait de grands profits pour ceux qui la maîtrisaient. Plusieurs cités se sont enrichies et ont prospéré grâce au trafic des esclaves, aussi bien dans le Soudan qu'en Afrique orientale. Dans le désert du Sahara, les chefs lançaient des expéditions contre les pillards de convois. Les souverains du Maroc médiéval avaient fait construire des forteresses dans les régions désertiques qu'ils dominaient, afin d'offrir des haltes protégées aux caravanes. Le sultan d'Oman a transféré sa capitale à Zanzibar( Zanzibar signifie « marché aux esclaves »), car il avait bien saisi l'intérêt économique de la traite arabe. Plusieurs milliers d'esclaves transitaient par Zanzibar chaque année au XIXe siècle avant d'être déportés en Arabie voire au Brésil. Le palais du sultan témoigne encore de sa fortune. Plusieurs milliers d'autres hommes travaillaient de force dans les plantations.
Il existait en outre des raisons sociales et culturelles à la traite : en Afrique subsaharienne, la possession d'esclaves était le signe d'appartenance à un haut rang social. Dans l'aire arabo-musulmane, les harems nécessitaient un « approvisionnement » en femmes.
Pour finir, il est impossible d'ignorer la dimension religieuse et raciste de la traite. Punir les mauvais musulmans ou les païens tenait lieu de justification idéologique à l'esclavagisme : les d